Déjà que la colonie lui manquait mais qu'en plus il ne se sentait pas vraiment à l'aise chez les romains, le fait de n'avoir pu toucher une forge depuis la destruction de son foyer était en train de le tuer. Il était le fils d'Héphaïstos après tout, le dieu de ces dites forge, il n'y avait que dans celles ci qu'il se sentaient réellement bien et pouvait occuper son esprit en laissant ses mains fabriquer et forger tout un tas de choses invraisemblables. Du coup, on pouvait comprendre aisément qu'il s'ennuyait comme un rat mort. Or l'ennuie pour un demi-dieu, c'est à dire un gamin hyper-actif, ça pouvait faire de véritable ravage. Il aurait bien aimé qu'avec ses frères et sœurs ils se soient monter une petite forge de fortune dans leur tente, seulement ils manquait de matériaux en plus de ne pas savoir si la création d'une telle chose ne serait pas vu comme une tentative de réarmement des grecs pour marcher sur le camp romain … Après tout ils étaient un groupe militaire et donc, forcement, parano ! … Voila une chose qu'il ne devrait sans doute jamais dire à voix haute, surtout pas à un romain bien sûr. Et pour ne rien arranger, l'humeur n'était vraiment pas là pour la majorité d'entre eux afin de se lancer dans un tel projet, ce qu'il pouvait parfaitement comprendre. Du coup ils s'occupaient tous comme ils pouvait, retapant de vieilles armes et armures cabossés ou s'attelant à de vieux projets qu'ils étaient parvenu à sauver des décombres de leur vieux bungalow et de leur ancienne forge. En bref, c'était vraiment un temps de crise pour eux où la moindre roue dentée valait plus qu'un lingot d'or.

Alors, si ils étaient tellement en manque de métallurgie et autres procédés du genre, pourquoi ne pas demander à utiliser la forge des romains ? Tout simplement parce que personne n'avait été capable de leur dire si ils en disposaient d'une ou pas. Enfin … disons plutôt qu'aucun romain n'avait voulu leur répondre et que leurs recherches personnelles avaient toujours été vaines. Mais bon sang, ils avaient bien tout un arsenal remplit d'arme en or impérial, non ? Des tas d'armures comprenant plastron, casque, jambières et brassards, n'est-ce pas ? Et vu tous les jeux de guerre qu'ils semblaient se faire, avec un éléphant dans leur rang en plus, il était impossible qu'aucune ne se soit jamais cabossée ! Dans ce cas où faisaient-ils les réparations ? Leurs armes aussi, ils n'allaient tout de même pas leur dire que c'était leur seul et unique stock ! Si vraiment c'était le cas, tout de suite il paraissaient moins menaçant si leurs ressources étaient aussi limitée. Mais là n'était pas l'important, ce qu'Ezekiel retenait c'était qu'il était certain qu'ils devaient disposer d'une forge et il comptait bien la trouver. Par chance, même si la relation entre grecs et romains étaient encore houleuse, ils n'en avaient pas moins un accès complet à l'ensemble de la zone, il pouvait donc mener ses petites recherches. Ses confrères étaient réticents à l'idée de se balader directement dans leur petit campement militaire, il pouvait bien comprendre, et les rares qui y avaient été n'étaient pas des Héphaïstos et n'aurait donc pas eu l'idée de relever si il y avait une forge ou non. Bien, c'était à lui qu'incombait la tâche de se rendre là bas alors, il n'avait pas peur des romains même si leurs regard l'agaçait au plus haut point, mais au moins comme ça il pourrait faire un plan de l'endroit une bonne fois pour toute et voir si il pouvait trouver ce qu'il désirait. Prenant un petit bloc note et un crayon, il prit la direction du camp militaire.

Comme prévu, tous les regards se posaient sur lui, parfois surpris, parfois curieux, mais aussi et bien trop à son goût, des regard haineux. Ouai ouai, il avait compris, on ne les aimait pas ici, graecus était même devenu une insulte pour eux, c'était vraiment pas croyable, pour une fois il se sentait plus mature qu'eux car jamais chez les grecs les romains avaient été une insulte. Enfin, il ne pouvait malheureusement pas changer le monde par ses belles paroles alors il préféra les ignorer, se concentrant sur son bloc note où il faisait un schéma très précis du lieu. Cela dit il avait un peu de mal, pas pour le dessin, ça au contraire il était bon voir même très bon, mais plutôt pour se repérer, de son point de vu tout se ressemblait et ça ne ressemblait à … rien. Autant la Nouvelle Rome était magnifique, autant il trouvait cet endroit plutôt tristounet et sans saveur en plus de lui faire perdre ses repère. Zigzagant entre les bâtiments et changeant de direction à chaque fois qu'il trouvait qu'on le regardait trop méchamment, il se retrouva bien vite dans un regroupement de cinq bâtiments particulièrement semblables outre quelques détails. C'était quoi ça maintenant ? Certainement pas une forge semblait-il vu la ressemblance des bâtiments, à moins bien sûr que ce ne soit cinq forges concentrée en un même lieu, ce qui serait le paradis d'après lui. Pour autant, ça valait au moins le coup de vérifier, au moins histoire d'en avoir le cœur net et de pouvoir compléter son petit plan avec autant de précision que possible. Après quelque seconde de réflexion, il se lança et pénétra dans la bâtisse la plus proche. À n'en point douter, c'était un dortoir. Un baraquement disaient-ils ? Bref c'étaient ici qu'ils dormaient. Intéressant ! Mais pas franchement utile à sa recherche. Mais avant de continuer il devait prendre tout ça en note, plongeant le nez sur son petit bloc-note alors que son crayon s’agitait sur le papier. Il n'avait pas remarqué qu'il n'était pas seul comme il le pensait mais qu'un jeune homme se trouvait là lui aussi.

Il faisait beau aujourd'hui, Sacha était de très bonne humeur. Le romain était toujours de mauvais poil lorsque le temps n'était pas au rendez-vous, et toujours très joyeux lorsqu'au contraire, le soleil brillait dans le ciel, c'était un fait. Or en cette fin de matinée, le soleil était au rendez-vous et Sacha avait donc le sourire aux lèvres. Il venait de terminer un entrainement intensif et dégoulinait de sueur. Les séances d'entrainements étaient toujours très dures chez les romains, très militaires. Après tout, ils n'étaient pas là pour bronzer ou pour passer leurs journées à s'amuser ; s'ils arrivaient à entrer dans la légion, c'était bien pour s'entrainer quotidiennement afin de construire une redoutable armée pour défendre la douzième légion en cas d'attaque quelconque. Mais depuis l'arrivée des grecs, Sacha avait un peu la tête ailleurs ; il se posait beaucoup de questions sur ces invités qui étaient pourtant des étrangers encore à ses yeux. Voilà déjà quelques jours qu'ils avaient installés leurs tentes sur le sol romain et Sacha avait déjà remarqué quelques coutumes qu'ils avaient, ou justement, des habitudes qu'ils n'avaient pas, alors que pour eux, les romains, ces choses là paraissaient des évidences. C'était assez impressionnant, tout comme surprenant, de se dire que tous ces demi-dieux étaient en fait les progénitures des même dieu, avec simplement quelques traits de caractère différents. Les dieux romains étaient plus autoritaires, plus guerriers, plus battants, plus militaires. Mars n'était pas aussi bagarreur et espiègle qu'Arès. Vénus n'était pas aussi superficielle qu'Aphrodite, peut-être un peu plus sportive. Les grecs te les romains étaient tellement différents. Sacha aurait bien aimé voir une fois dans sa vie l'ancienne colonie grecque, ne serait-ce que pour les découvrir, les apprendre un peu plus. Même s'il prétendait le contraire, ces nouveaux arrivants l'intriguait beaucoup. Ils avaient éveillé sa curiosité.. tout comme sa méfiance.

Il était environ onze heures, Sacha avait terminé pour la matinée. Alors que tous les autres légionnaires de sa cohorte se dispatchaient dans différent endroits afin de profiter un maximum du beau temps, Sacha s'isola et se dirigea vers les tentes. Au passage, il salua un ou deux amis de la première cohorte avec qui il s'entendait particulièrement bien. Sacha était quelqu'un de plutôt populaire dans le camp, beaucoup de monde l'appréciaient, malgré son côté légèrement macho, prétentieux et autoritaire. Il n'en était pas sympathique, farceur et amusant pour autant. Disons surtout qu'il avait une bonne estime de sa petite personne, et peut-être un peu moins d'un type de la cinquième cohorte ou d'une jeune fille qui ne sait même pas manier un arc ou un glaive. Il entra donc dans la tente de la troisième cohorte. Même s'il ne faisait pas parti de la première ou de la deuxième cohorte, et bien qu'il l'avait beaucoup voulu et espéré, Sacha était très fier de sa place dans la troisième tente. De toute façon, Sacha était fier de tout ce qui rattachait d'une manière ou d'une autre à l'une, donc bon.. La tente était vide, personne ne pourrait donc le déranger, ce qui n'était pas plus mal. Il avait besoin d'une bonne douche, et se rendit donc dans la salle de bain et commença à se déshabiller.

Sacha quitta la salle de bain, une serviette autour du cou qui lui avait servi à essuyer ses cheveux, habiller d'un jean et d'un tee-shirt rouge délavé à imprimés, et chaussé de tongs. Il avait encore un sourire radieux sur les lèvres, signe qu'il était toujours d'aussi bonne humeur, et il sifflotait et chantonnait tout en se dirigeant vers l'étagère, où il y rangea son gel douche et son shampoing. Mais lorsqu'il se retourna, il se rendit alors compte qu'il n'était plus seul. En effet, un jeune homme de surement son âge au visage qui lui était inconnu venait de faire irruption dans la tente. Ce qui était sur, c'était que ce n'était pas un romain, et donc encore moins un légionnaire de la troisième cohorte. Un grec, donc. Sacha fronça les sourcils. Il s'était toujours méfié des grecs, et ce n'était pas aujourd'hui que cela allait changer. Il se retourna et s'approcha légèrement du nouvel arrivant. « T'es qui toi ? T'as rien à faire ici je pense. Et d'ailleurs, qu'est-ce que tu fous dans cette tente ? J'aimerais bien savoir. » Déclara-t-il en perdant toute sa bonne humeur. Ce grec se permettait d'entrer dans une tente romaine ? Sans même avoir d'autorisation et sans avoir prévenu de sa présence, en plus ? Il n'avait pas vraiment dû tout comprendre, celui là. Alors, Sacha remarqua le détail qui tue. « C'est quoi ce carnet ? Ah, je sais ! T'es un espion en fait, tu viens chercher des infos pour les dire à tes petits camarades graecus ! Hé ouais man, on me la fait pas à moi ! » S'exclama-t-il en claquant sa langue contre son palais.

Pour un dortoir il trouvait ça très … pouvait-on dire spartiate en parlant des romains ? Quoi qu'il en soit l'endroit semblait plus fonctionnel qu'agréable, du moins c'est ce qu'il en ressortait en comparant avec son souvenir des Bungalow. Il faut dire aussi que leurs bungalow … bah c'était un peu particulier, rien que celui des Héphaïstos c'était une usine steampunk aménagée à la fois pour bricoler et se reposer dans les meilleurs conditions, bref, le rêve ! Mais là où il voulait en venir, c'est qu'on voyait clairement la scission entre un lieu qui était fait pour relaxer ses occupant et un lieu pour les laisser se reposer entre un entraînement et un cours de tactique militaire. Ce que Meredith était heureux d'être enfant d'Héphaïstos et non de Vulcain, c'était tellement plus agréable ! Et l’entraînement avec Lupa dont il avait entendu parler, il en tremblait rien que d'y penser.

Mais alors qu'il était plongé dans ses pensées, dessinant mécaniquement son petit plan de manière plus détaillé que nécessaire, il n'avait pas vu qu'il n'était plus tout seul. C'est donc paradoxalement sans surprise qu'il se mit à sursauter en entendant sa voix, faisant glisser son crayon qu'il ne parvint pas à rattraper après avoir gesticulé comme un abruti. Tant pis pour le crayon, au moins il ne tomberait pas plus mal. Meredith par contre, il se redressa d'un coup, le visage empourpré par la gêne. Il était un peu perdu, il s'y était vraiment pas attendu, pas à croiser un romain dans leur propre camp, non, ça ça aurait été débile, mais à ce que quelqu'un débarque depuis l'intérieur alors qu'il pensait vraiment être seul. D'ailleurs d'où il venait ? Vu comment il était trempé, sans doute était-il en train de prendre une douche. Ils avaient des douches automatiques ? Est-ce que les romains se rendaient compte à quel point ils seraient prêt à tout pour de vraies douches ? Une autre pensée traversa son esprit, il regretta que le T-shirt du romain ne soit pas plus moulant avec cette humidité, ce qui le fit devenir encore plus rouge et s'insulter lui même de penser à ça. Bon sang, il commençait à comprendre pourquoi Siam voulait l'enfermer dans un placard pour que personne ne le voit, il n'était vraiment pas doué.

Il s'apprêta à répondre mais il n'en eut pas le temps, voilà que la boule de nerf reprenait et cette fois il l'accusait d'espionnage. Quoi, sérieusement ? Il regarda son bloc-note et devint livide. Ah non ! C'est faux, il n'espionnait pas, c'était juste innocent, il pouvait le jurer. Il n'avait surtout pas intérêt à croire qu'il avait de mauvaises intentions et à faire tourner l'information, sinon il serait dans la merde et mettrait à mal leurs relations gréco-romaine. Pourquoi est-ce que ça arrivait toujours à lui ? Pas le temps de se lamenter, il devait le calmer et lui expliquer les choses, en espérant qu'il serait prêt à l'écouter et pas l'un de ces paranoïaque qui pensait que tous les grecs étaient des comploteurs. Au passage il n'avait pas apprécié sa pseudo insulte, mais il ne pouvait pas se permettre de jouer les outrés pour l'intérêt de leurs relations diplomatique, non, il devait s'écraser, comme toujours.

« Quoi ? Attends ! Non ! Ce n'est pas ce que tu crois. Je … je faisais juste un plan de votre campement, rien de plus, juré. »

Voila qui lui semblait bien, puis il se repassa sa phrase dans sa tête et il se rendit compte que c'était encore pire. Il se frappa le front d'un coup avec la paume de sa main. Mais qu'est-ce qu'il pouvait être con parfois. Bon, ça va, il devait se calmer, il avait encore moyen d'arranger ça.

« Pas un plan pour vous attaquer, hein ? » Ce qui n'était pas mieux comme explication « Je veux dire … raaah, pourquoi je suis aussi nul … Reprenons depuis le début, je m'appelle Ezekiel, je suis un enfant d'Hépahïstos. Or, en tant que tel, on a besoin de faire quelque chose de nos mains sinon on ne se tient plus, mais on a plus vraiment de forge pour se faire des automates ou des armes. Du coup je suis venu voir si, peut être, vous n'en auriez pas une ici. »

Venait-il de dire dans son discours qu'il cherchait un endroit pour qu'ils puissent se forger des armes et une armées d'automates ? C'était comme ça qu'on pouvait le comprendre du moins et malheureusement pour lui, ça il ne s'en était pas rendu compte et ne pouvait pas rattraper sa nouvelle bêtise.